Article original
Traitement de la rétraction palpébrale supérieure associée à l’ophtalmopathie dysthyroïdienne en phase active inflammatoire avec l’injection de toxine botulique AManagement of upper eyelid retraction associated with dysthyroid orbitopathy during the acute inflammatory phase with botulinum toxin type A

https://doi.org/10.1016/j.jfo.2016.10.016Get rights and content

Résumé

But

Évaluer l’efficacité de la toxine botulique-A par voie transconjonctivale pour le traitement de la rétraction palpébrale supérieure en phase inflammatoire de l’ophtalmopathie dysthyroïdienne, établir le dosage idéal et mesurer les effets secondaires.

Patients et méthodes

Il s’agit d’une étude prospective et comparative conduite à l’institut d’ophtalmologie Conde de Valenciana, Mexique. Les patients inclus avaient une orbitopathie dysthyroïdienne en phase inflammatoire et ils ont été traités avec l’injection sous-conjonctivale de toxine botulique-A (BTX-A) dans la paupière supérieure. Les patients ont été divisés en deux groupes. Groupe 1 : ce groupe a reçu l’application sous-conjonctivale, en dose unique à l’œil non dominant, de 5U de BTX-A et le groupe 2 a reçu l’application de 10U. La prise en charge initiale consistait à évaluer l’acuité visuelle, la distance entre le bord libre de la paupière supérieure et le réflexe lumineux du centre de la pupille (RPM1), la hauteur du pli, la mesure de la motilité oculaire et la présence de diplopie ou kératite précédente et postérieure à l’administration de la toxine. Les patients ont été suivis à la première semaine, à la semaine 4 et à la semaine 16. Nous avons fait un test de Student t apparié pour l’analyse statistique.

Résultats

À la semaine 4, 15 patients (100 %) ont présenté une diminution de la distance réflexe pupille–paupière. Les résultats moyens pour le groupe 1 a été de : −1,75 mm (−1 à 2,5 mm) et le groupe 2 de : −2 mm (−1 à −4 mm). Des différences statistiques ont été observées avant et après le traitement (à semaine 4) dans les deux groupes mais pas entre les différents dosages de BTX-A. Une amélioration à 100 % de la kératite lagophtalmique a été observée sur 5 patients du groupe 1 et sur 2 patients du groupe 2. L’acuité visuelle, la hauteur du pli et la motilité oculaire n’ont pas été modifiés avec l’injection dans le 93 % des patients. Un patient du groupe 1 a présenté une ptosis et diplopie verticale qui s’est résolue spontanément au cours de la 6e semaine.

Conclusions

L’application par voie transconjonctivale de la toxine botulique-A pour traiter la rétraction palpébrale dans l’orbitopathie dysthyroïdienne est sûre et efficace. On n’a pas trouvé des différences significatives entre le dosage (groupe 1 et 2). Des effets secondaires sévères n’ont pas été signalés.

Summary

Purpose

To evaluate the efficacy of transconjunctival botulinum toxin type A (BTX-A) in the treatment of upper eyelid retraction in the active inflammatory phase of dysthyroid orbitopathy, establish the ideal dose, and evaluate side effects.

Methods

This is a comparative, prospective study in patients with thyroid orbitopathy, conducted at the Conde Ophthalmology Institute in Valenciana, Mexico. The patients included had dysthyroid orbitopathy in the inflammatory phase, and they were treated with subconjunctival injection of botulinum toxin type A (BTX-A) in the upper eyelid. Five units (group 1) and ten units (group 2) of BTX-A, in a single subconjunctival dose were applied to the non-dominant eye. We evaluated visual acuity, margin-to-reflex distance (RPM1), crease height, ocular motility, diplopia and keratitis, before and after administration of the toxin. The patients were followed at one, 4 and 16 weeks, with the Student t-test as a statistical analysis.

Results

At week 4, 15 patients (100%) showed a reduced margin to reflex distance. The mean result for group 1 was −1.75 mm (range −1 to −2.5 mm) and group 2 was −2 mm (range −1 to −4 mm). Statistically significant differences were seen between pre-treatment and week 4 in both groups, but no differences between doses. Complete improvement of keratitis and lagophthalmos was observed in 5 and 2 patients, respectively. Visual acuity, ocular motility and crease height did not change in 93% of the patients. One patient (group 1) exhibited complete ptosis and vertical diplopia, which resolved spontaneously at week 6.

Conclusion

Transconjunctival BTX-A application is safe and effective for the treatment of eyelid retraction in dysthyroid orbitopathy. No difference was found between doses. No severe side effects were reported.

Introduction

L’orbitopathie disthyroïdienne est la cause la plus commune de rétraction palpébrale supérieure qui peut être provoquée soit par l’action exagérée, de nature adrénergique, du muscle de Müller, soit par une fibrose et un raccourcissement fonctionnel du muscle releveur [1], [2], [3].

Normalement, le bord libre de la paupière supérieure masque le limbe de 2 mm environ. La rétraction palpébrale s’évalue en mesurant la distance entre le bord libre de la paupière au centre de la cornée (Reflex Pupil Margin 1 ; RPM1). On parle de rétraction palpébrale lorsque cette distance est supérieure à 4,5 mm.

Il existe deux phases : une phase active inflammatoire où se succèdent poussées et rémissions pendant 12 à 18 mois, suivie d’une phase statique ou non inflammatoire qui peut durer un an, voire plus. Des signes inflammatoires sont retrouvés dans 32 à 75 % des cas [4]. Ils associent des douleurs orbitaires profondes, une rougeur de la conjonctive, de la caroncule et des paupières et un œdème des paupières et de la conjonctive [4], [5].

Plusieurs classifications peuvent être realisées, notamment la Clinical Activity Score (CAS) qui évalue l’activité clinique de la maladie (modifié par EUGOGO après Mourits et al.) sur les 7 paramètres suivants : douleur orbitaire spontanée ou evoquée avec les mouvements oculaires, présence de l’œdème ou érythème palpébrale, chémosis ou érythème conjonctival et inflammation de la caroncule [5]. Un point est donné pour chacun des paramètres. Une orbitopathie thyroïdienne cliniquement active en phase inflammatoire est définie par un CAS score supérieur a 3/7 [5], [6].

Le traitement chirurgical pendant la phase inflammatoire de l’ophtalmopathie dysthyroïdienne peut représenter un risque relatif pour le patient ainsi que des résultats imprévisibles. Pendant cette période, les patients peuvent avoir des signes tels que la présence d’un œdème palpébral, d’un chémosis conjonctival et d’une congestion des vaisseaux conjonctivaux et épiscléraux situés sous les insertions des muscles extraoculaires, ainsi que des altérations cosmétiques et des gênes oculaires associés au syndrome sec oculaire ou à la kératite lagophtalmique secondaire à la rétraction [6].

L’instillation pluriquotidienne de collyres ou gels mouillants et des larmes artificielles peuvent améliorer l’inconfort visuel mais si ces symptômes persistent malgré le traitement, si la rétraction est sévère ou si l’aspect esthétique dû à la rétraction palpébrale est inacceptable pour le patient, l’injection de toxine botulique est suggérée [7].

La prise en charge chirurgicale de la rétraction de la paupière supérieure et le traitement des séquelles est idéalement l’étape ultime de la réhabilitation chirurgicale de l’orbitopathie dysthyroïdienne. Les indications sont posées après 6 mois de stabilité déterminé grâce aux mesures faites à chaque consultation [8].

Le recul du complexe releveur-Müller, une mullerectomie ou une myotomie ne peuvent pas être réalisées pendant la phase inflammatoire de la maladie due au manque de prédictibilité et sont interdits [9], [10].

La toxine botulique est un médicament qui bloque sélectivement la libération d’acétylcholine au niveau de la plaque neuromusculaire et provoque une paralysie musculaire transitoire [11] ; son action se dirige vers le muscle releveur, en l’affaiblissant temporairement [12], [13].

Diverses études suggèrent que la toxine botulique soit donc une alternative pour les patients qui se trouvent dans une phase inflammatoire active (PIA), pour les patients dont le traitement chirurgical n’est pas indiqué ou en attendant l’heure de la chirurgie [14], [15].

Section snippets

Objectifs

Comparer l’efficacité de deux doses différentes de toxine botulique-A (BTX-A) appliquées par voie transconjonctivale pour le traitement de la rétraction palpébrale supérieure aux patients avec une orbitopathie thyroïdienne en PIA.

Patients et méthodes

Nous avons réalisé une étude clinique expérimentale, comparative et longitudinale développée d’octobre 2014 à janvier 2015.

Technique de dilution et application de la toxine

La toxine botulique A (Botox, Allergan®, Irvine, CA, États-Unis) diluée en solution saline stérile à une concentration de 10U/0,1 mL. L’application a été réalisée sous l’anesthésie topique avec des gouttes de tétracaïne (Ponti-Ofteno, Laboratorios Sophia, Jalisco México) en une seule application à l’œil non dominant par voie sous-conjonctivale (Fig. 2) par-dessus du bord supérieur du tarse.

La technique d’application transconjonctivale de la toxine a été utilisée en essayant de visualiser

Résultats

Un total de 15 patients et 15 yeux ont été inclus dans l’étude, 11 femmes (73,3 %) et 4 hommes (26,6 %), âgés en moyenne de 44,5 ans, entre 20 et 69 ans. Le groupe 1 comprend 8 patients et le groupe 2 comprend 7 patients. À la semaine 4, le 100 % présentait une diminution de la distance paupière–cornée (RPM1) (Tableau 1).

Dans le groupe 1, le résultat moyen de la diminution de la distance paupière–cornée a été de −1,4 mm (rang de −0,5 à 2,5 mm), dont 4 patients (50 %) ont présenté une diminution

Discussion

La prise en charge de la rétraction palpébrale supérieure en phase active de l’ophtalmopathie dysthyroïdienne est toujours un défi pour les ophtalmologues.

Nos résultats sont similaires aux décrits par Uddin ainsi que Morgenstern et al. Uddin a traité 11 patients avec l’administration transconjonctivale de 5U à 15U en présentant tous une amélioration dans la position de la paupière. Cependant, il y a que 3 qui on achevé une position au niveau ou par dessous du limbe. Parmi, 72 % de ses patients

Conclusions

L’application de la toxine botulique-A sous-conjonctivale est sûre et efficace pour le traitement de la rétraction palpébrale dysthyroïdienne en phase inflammatoire de la maladie. On n’a pas trouvé de différences significatives entre les deux dosages (5U et 10U) et même si les résultats son temporaires et variables, son application est fortement recommandé.

Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Références (15)

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Cited by (10)

  • Oral selenium improved the disease activity in patients with mild Graves’ orbitopathy

    2021, Journal Francais d'Ophtalmologie
    Citation Excerpt :

    GO activity is assessed with the Clinical Activity Score (CAS), which consists of 7 inflammatory signs, considered active with the presence of at least 3 signs [2]. Treatment in mild cases includes lubricant eye-drops to improve ocular surface symptoms, botulinum toxin in case of palpebral retraction or prisms in case of diplopia [3,4]. Moderate to severe forms of GO can be treated with corticosteroids or radiation.

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