Elsevier

Pathologie Biologie

Volume 61, Issue 6, December 2013, Pages 239-244
Pathologie Biologie

Revue générale
Pneumocystis : épidémiologie et approches moléculairesPneumocystis: Epidemiology and molecular approaches

https://doi.org/10.1016/j.patbio.2013.05.001Get rights and content

Résumé

La pneumocystose est une infection opportuniste fréquente chez les patients immunodéprimés, en particulier les sidéens. Le diagnostic de cette pneumonie présente plusieurs difficultés vu la faible sensibilité des colorations classiques et l’absence de milieux de culture pour Pneumocystis. Les techniques de biologie moléculaire et spécialement la PCR ont permis d’améliorer la détection de l’ADN de ce champignon dans les prélèvements invasifs et non invasifs et même dans l’environnement, ce qui a mis en valeur la transmission interhumaine et l’existence d’une source environnementale de Pneumocystis. Par ailleurs, différentes techniques de biologie moléculaire ont été employées pour le typage des souches de Pneumocystis et surtout P. jirovecii qui est caractérisé par une importante biodiversité génétique. Enfin, l’utilisation très large du cotrimoxazole pour le traitement et surtout pour la prophylaxie de la pneumocystose pose le problème de l’augmentation des résistances aux sulfamides chez P. jirovecii.

Abstract

Pneumocystosis is a common opportunistic infection in immunocompromised patients, especially in AIDS patients. The diagnosis of this pneumonia has presented several difficulties due to the low sensitivity of conventional staining methods and the absence of culture system for Pneumocystis. The molecular biology techniques, especially the PCR, have improved the detection of DNA of this fungus in invasive and noninvasive samples, and in the environment which highlighted human transmission and the existence of environmental source of Pneumocystis. In addition, various molecular biology techniques were used for typing of Pneumocystis strains, especially P. jirovecii, which is characterized by a significant genetic biodiversity. Finally, the widespread use of cotrimoxazole for the treatment and prophylaxis of pneumocystosis has raised questions about possible resistance to sulfa drugs in P. jirovecii.

Introduction

Pneumocystis est un microchampignon atypique très répandu parasitant les poumons de nombreux mammifères. L’importance clinique de ce champignon opportuniste est liée à la pneumonie sévère qu’il peut provoquer chez les personnes immunodéprimées. Chez ces patients, l’incidence de la pneumocystose à Pneumocystis varie de 10 à 40 % avec un taux de mortalité pouvant atteindre 50 %. Cependant, les prévalences de l’infection sont variables entre les patients immunodéprimés infectés par le virus d’immunodéficience humaine (VIH) et ceux VIH négatif et elles dépendent des techniques de détection utilisées [1], [2]. Plusieurs études ont montré que ce champignon présente une étroite spécificité d’hôte et différentes techniques de biologie moléculaire ont été employées pour le typage des souches de Pneumocystis et surtout P. jirovecii qui est caractérisé par une importante biodiversité génétique [3], [4], [5], [6], [7]. L’analyse du gène ITS (internal transcribed spacer) et du gène de l’ARN ribosomal a facilité l’étude des cas groupés de pneumocystose détectés dans le milieu hospitalier et de conforter l’hypothèse d’un mode de transmission horizontale chez l’homme [8], [9], [10].

Section snippets

Spécificité d’hôte et nomenclature

Pneumocystis se développe chez différents mammifères et présente des aspects morphologiques semblables en microscopie photonique, c’est pourquoi, on a longtemps pensé qu’il s’agissait d’un seul et même micro-organisme [11]. La spécificité d’hôte a été explorée par inoculation croisée de Pneumocystis de différentes espèces hôtes. Divers travaux ont montré que Pneumocystis extrait d’une espèce hôte donnée n’est capable de provoquer une pneumocystose que chez cette même espèce [12]. Il existe en

Réservoir environnemental

La localisation quasi exclusivement pulmonaire de la pneumocystose suggère un mode de contamination par inhalation à partir du microchampignon présent dans le milieu extérieur.

L’utilisation de collecteurs de particules et le développement de techniques de plus en plus sensibles comme la PCR a permis de retrouver de l’ADN de P. jirovecii dans l’environnement. L’ADN de P. jirovecii a été détecté dans l’air en milieu rural [28], hospitalier [29] et dans des animaleries [30], mais aussi dans de

Interaction hôte–champignon

Pour que la phagocytose ait lieu, il faut préalablement que les macrophages entrent en interaction avec le champignon. Il s’agirait d’une reconnaissance directe via des liaisons de type ligand–récepteur entre les « résidus mannoses » de la glycoprotéine majeure de surface (MSG) du champignon et les récepteurs au mannose disposés à la surface des macrophages alvéolaires. P. jirovecii a développé différents mécanismes d’évasion vis-à-vis de la réponse immunitaire [41]. Lasbury et al. ont montré

Facteurs de risque prédisposant à la pneumocystose

Chez les patients VIH+, le principal facteur de risque est un taux de lymphocytes CD4+ inférieur à 200/mm3 de sang. En dessous de ce seuil, le risque de développer une pneumocystose augmente exponentiellement avec la diminution des CD4+ [46].

Chez les patients immunodéprimés non VIH, le risque de développer une pneumocystose ne semble pas aussi bien corréler avec le taux de CD4+ [47] mais surtout lié à la nature de la pathologie sous-jacente ainsi qu’à la profondeur et la durée de

Infection chez le patient immunodéprimé

Dans la forme typique, la pneumocystose se présente sous forme d’une pneumopathie hypoxémiante. Elle se manifeste classiquement par une triade de symptômes associant dyspnée, toux sèche et fièvre. Cependant, cette triade clinique est souvent incomplète, voire absente dans certains cas [50]. Dans leur étude portant sur 32 patients VIH+, la triade complète était présente chez 41 % des patients [51]. La radiographie pulmonaire objective généralement un infiltrat interstitiel diffus bilatéral [50],

Les colorations

Il est recommandé d’utiliser deux techniques de colorations complémentaires, l’une mettant en évidence tous les stades parasitaires et tous les types cellulaires, l’autre mettant en évidence la paroi des kystes et sporocytes.

Électrophorèse en champ pulsé

Cette technique a été utilisée pour déterminer le polymorphisme caryotypique de Pneumocystis. Elle est actuellement peu utilisée dans le typage moléculaire. Elle consiste à déterminer la taille et le nombre des chromosomes de Pneumocystis chez l’homme et plusieurs animaux. Le nombre de chromosomes est différent chez Pneumocystis selon l’espèce hôte [13], [71], [72]. Il faut remarquer que le nombre de chromosomes observés par électrophorèse en champ pulsé varie considérablement selon les auteurs

Émergence de résistance

L’utilisation très large du cotrimoxazole pour le traitement et surtout pour la prophylaxie de la pneumocystose et des autres infections opportunistes a entraîné l’émergence de résistance chez différents micro-organismes. En effet, l’activité du cotrimoxazole est presque entièrement attribuable au sulfaméthoxazole qui est un inhibiteur de la DHPS. Cette constatation a conduit à s’interroger sur d’éventuelles résistances aux sulfamides chez P. jirovecii. Plusieurs équipes ont orienté leurs

Conclusion

L’étroite spécificité d’hôte de Pneumocystis suggère que les populations humaines représentent le réservoir de P. jirovecii, seule espèce du genre identifiée chez l’homme. En l’absence de culture de Pneumocystis, les techniques de biologie moléculaire ont permis d’améliorer la détection de P. jirovecii dans les prélèvements cliniques ainsi que la mise en évidence de l’importante biodiversité de ce champignon atypique. Enfin, l’application des techniques de PCR-RFLP et PCR-séquençage a permis de

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