L’échographie ciblée fait maintenant partie intégrante du programme national de résidence en anesthésiologie au Canada : au terme de sa formation, l’anesthésiologiste doit être capable d’utiliser cette technologie pour aider au diagnostic et à la prise en charge des patients instables ainsi que pour assurer un meilleur monitorage. Le manuel d’échographie en anesthésie-réanimation et médecine péri-opératoire est produit par le Collège national des enseignants d’anesthésie et de réanimation de France et aborde l’utilisation de l’échographie en anesthésie-réanimation.
Ce manuel de poche de 289 pages se divise en six parties : l’utilisation en urgence de l’échographie, l’échographie céphalique, l’échographie cardiaque, l’échographie des voies aériennes et pleuro-pulmonaires, l’échographie abdominale et l’échographie des membres. Chacune des sections décrit les indications, le protocole de mesure, les mesures normales ainsi que les images pathologiques. Le manuel s’accompagne de plusieurs figures et tableaux qui corroborent le texte et qui permettent d’identifier le site exact de mesure sur les images échographiques. Plusieurs algorithmes de prises en charge cliniques basés sur l’échographie permettent de bien comprendre l’utilisation de l’échographie auprès d’un patient.
Ce manuel ne s’adresse toutefois pas aux néophytes, car il sous-tend de bonnes connaissances de base en échographie. Effectivement, ce livre n’aborde pas la physique de base, la relation fréquence et résolution, les différentes sondes, les réglages et les différents types d’imagerie Doppler et leurs acquisitions. Toutefois, les auteurs y abordent des notions très avancées qui ne sont pas pertinentes pour le praticien général, ce qui ajoute une lourdeur inutile à ce manuel. Plusieurs terminologies françaises peuvent aussi laisser le lecteur perplexe (angle d’insonation, béquiller) et les structures anatomiques portent parfois des noms différents (feuillet, cusp, sigmoïde).
La première partie traite de la pose échoguidée des cathéters artériels et veineux ainsi que du FAST (Focused Assessment with Sonography for Trauma). Cette partie résume bien les techniques de ponctions avec échographie et la portion sur le FAST explique très bien, avec images à l’appui, la réalisation de cette étude ainsi que les pièges à éviter.
La deuxième partie fait un bon résumé de l’utilisation de l’échographie pour l’identification de l’hypertension intracrânienne via le diamètre du nerf optique et aborde par la suite l’utilisation du Doppler transcrânien dans le monitorage cérébral, principalement dans la prise en charge du traumatisé crânien ou dans un contexte d’hypertension intracrânienne. L’échographie des sinus est aussi décrite en seconde partie. Ces sujets sont toutefois plus utiles en soins intensifs qu’au bloc opératoire.
L’échographie cardiaque transthoracique ciblée, appelée à
devenir une norme en anesthésie, est stimulée par l’émergence,
depuis les dernières années, de sondes transthoraciques
compatibles avec les appareils. Ce sujet est abordé dans le chapitre 3 qui forme près de la moitié du manuel. Tous les aspects sont abordés, de la dysfonction ventriculaire aux valvulopathies, en passant par l’installation de canules d’oxygénation extracorporelle et le monitorage d’une assistance ventriculaire. Des notions très avancées d’échographies sont ici abordées telles que la zone de convergence, le strain et même l’échographie trois dimensions. L’échographiste général risque fort d’être dérouté par toutes ces informations peu applicables et peu utiles pour le clinicien qui ne fait pas d’anesthésie cardiaque. Quelques erreurs au niveau des figures sont aussi à noter, tel que l’ordre des festons mitraux dans la vue mid-commissurale et la vue deux chambres (90°) à la page 152, ainsi qu’une erreur de figure à la page 84, qui présente une vue quatre chambres au lieu d’une vue mid-commissurale.
Le chapitre 4 sur l’évaluation pulmonaire résume très bien l’utilisation de l’échographie dans le diagnostic différentiel de la dyspnée. Un glossaire résume les signes à rechercher (ligne A, B, etc.).
Le chapitre 5 discute de l’utilisation de l’échographie abdominale dans l’évaluation du jeûne ainsi que dans l’évaluation de la dysfonction rénale. Le dernier chapitre explique l’application de l’échographie dans le diagnostic des thromboses veineuses. Les algorithmes cliniques y sont clairs.
En conclusion, ce manuel aborde de manière synthétique mais tout en restant très large l’ensemble des applications possibles de l’échographie en anesthésie. Ce manuel a un prix abordable; il pourrait servir de référence rapide dans l’application clinique de l’échographie en anesthésie et ce, principalement grâce aux nombreux algorithmes présentés dans le manuel. Certaines parties abordent toutefois des sujets très pointus et non pertinents pour la majorité des anesthésistes réanimateurs qui utilisent l’échographie dans un rôle ciblé et qui ne disposent pas d’appareil d’échographie haut de gamme avec toutes les sondes disponibles. De plus, les sujets avancés sont abordés de manière trop simpliste pour l’échographiste avancé pour lequel d’autres références sont beaucoup plus complètes comme les livres de poche de Dre Annette Vegas de Toronto. Une version électronique avec vidéo et plus concise aurait été probablement plus avantageuse pour le praticien général. Malgré plusieurs chapitres très pertinents pour l’anesthésiste nord-américain, ce manuel s’adresse probablement plus aux cliniciens travaillant en soins intensifs et aux résidents en anesthésie désireux de connaître l’ampleur de l’utilisation de l’échographie en anesthésie-réanimation.
Publisher's Note
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